J’aurais voulu être un Patou
Les citadins qui se rendent en montagne en ont souvent une vision trop « romantique », entraînant une mauvaise compréhension du rôle du patou. Ils peuvent le trouver agressif ou menaçant, alors qu’il est simplement en train d’accomplir sa mission de protection. Même si, chaque été, un important travail de vulgarisation est fait pour expliquer les comportements à tenir, il faut reconnaître que la confrontation du monde urbain et du monde montagnard reste complexe, à une époque où le touriste considère souvent les alpages comme un simple terrain de jeu.
Profitant des chaudes journées de canicule, j’ai replongé dans la fraîcheur des bibliothèques pour regarder comment nos grands auteurs parlaient des patous, à une époque où la montagne était vierge de
tout tourisme.
« Voici quelques textes admirables, souvent méconnus, qui valent bien plus qu’un long discours. Bonne lecture ! »
PATOU dans le style d’un haïku japonais
Grand chien blanc des montagnes
Gardien des troupeaux
Le patou est là.
Paul Eluard – Voyage dans les Alpes
PATOUS, PATOUS
Patous, patous, chiens magnifiques
Qui gardez les troupeaux dans les monts pacifiques
Vous êtes les gardiens d’un monde en sursis
Fait d’hommes et de nature à jamais en conflit
Patous, patous, chiens généreux
Qui donnez votre vie aux moutons malheureux
Vous êtes les héros d’une cause oubliée
D’honneur et de devoir à jamais glorifiés
Patous, patous, chiens solitaires
Qui vivez loin du bruit et de l’intense lumière
Vous êtes les témoins d’une époque révolue
De Terre et de Ciel à jamais confondus
Patous, patous, chiens admirables
Qui portez dans vos yeux la douceur de l’étable
Vous êtes les poètes d’une beauté sublime
Où la force et la grâce sont à jamais intimes
Victor Hugo – OEuvre de jeunesse
JE ME SOUVIENS…
Je me souviens d’une promenade que je fis un jour dans les Alpes, où je rencontrais un berger qui gardait ses moutons avec l’aide de deux patous. Ces chiens me frappèrent par leur taille, leur force et leur beauté. Ils étaient blancs comme la neige, avec des taches grises ou jaunes sur le dos et la tête. Leurs yeux étaient vifs et intelligents, leurs oreilles droites et pointues, leur poil épais et lustré. Ils avaient une allure noble et fière, qui annonçait leur courage et leur dévouement.
Le berger me dit qu’ils étaient ses meilleurs amis, qu’ils ne le quittaient jamais, qu’ils veillaient sur lui et sur ses bêtes avec une vigilance infatigable. Il me raconta comment ils avaient repoussé plusieurs fois les attaques des loups ou des ours, qui rôdaient dans ces montagnes sauvages. Il me dit aussi qu’ils étaient doux et affectueux avec lui, qu’ils se couchaient à ses pieds quand il se reposait, qu’ils lui léchaient la main quand il les caressait, qu’ils lui obéissaient au moindre signe.
Je fus touché par cette amitié entre l’homme et l’animal, qui me parut plus pure et plus sincère que celle qui unit souvent les hommes entre eux. Je pensais que ces chiens étaient plus heureux que bien des hommes, qui vivent dans le tumulte des villes, qui s’agitent pour des intérêts vains, qui se trompent, qui se haïssent, qui se font du mal. Je pensai que ces chiens étaient plus sages que bien des hommes, qui méprisent la nature, qui la dégradent, qui la violentent, qui l’oublient. Je pensai que ces chiens étaient plus vertueux que bien des hommes, qui manquent de fidélité, de générosité, de courage, de justice.
Je me sentis alors une sorte d’envie pour ces chiens, qui me parurent posséder les qualités que j’estimais le plus chez les êtres sensibles. Je me dis que si je devais renaître sous une autre forme, je voudrais être un patou. Je me dis que je serais alors plus proche de la nature, plus libre, plus tranquille, plus heureux. Je me dis que je serais alors plus digne de l’amour du Créateur, qui a fait toutes choses bonnes et belles.
Je quittais le berger et ses chiens avec regret, en leur souhaitant tout le bonheur possible. Je poursuivis ma route en rêvant à ce que je venais de voir et d’entendre. Je me sentis plus ému et plus éclairé qu’auparavant. Je remerciais le ciel de m’avoir donné l’occasion de faire cette rencontre instructive et touchante.
Jean-Jacques Rousseau – Rêveries d’un promeneur solitaire
« Amis lecteurs, vous m’avez suivi jusqu’au bout de ces lignes, osez que je vous dise, que ces vers méconnus sont à jamais le fruit de mon cerveau taquin. Ils furent en effet créés lors d’un dimanche ensoleillé par une intelligence artificielle à qui je demandais d’écrire à la manière de Rousseau, Hugo ou Eluard. »
Si le style est parfois approximatif, malgré quelques retouches, j’espère que l’exercice vous aura pour le moins fait sourire. Mais n’oublions pas qu’aucun robot, qu’aucun drone, qu’aucune intelligence artificielle ne pourra jamais remplacer l’admirable et unique connivence entre un patou et son berger. Et c’est bien cela que nous devons avant tout transmettre et partager avec ceux qui viennent dans nos massifs.